pangée, regarde-moi

intrigue numéro deux

Tourne, tourne, tourne, autour du vide.
Varsovie attend, Varsovie regarde. Porte de la Lune, ouvre-toi ! Une semaine s'est écoulée. Angoisse et stratégie se succèdent. Mettre à l'abri, répliquer, mettre à l'abri, se planquer. Les pions de l'échiquier sur la carte, qui avancent, qui avancent, sans qu'elle ne puisse entrevoir leur nature. Le sang ronge les os à petit feu. Dressée sur son perchoir, elle observe, bras croisés, tandis que le feu crépite derrière elle. Tintements de fer, ricanements des inquiets pour faire taire l'appréhension de ce qui va poindre. Quand elle se détourne, elle observe à la dérobée les quelques visages qu'elle côtoie presque quotidiennement. Pointillés de ses phrases narratives, ils ont bâti ce qu'elle est.

« Dit donc, qui a pensé que ramener de l'alcool serait une idée ingénieuse ? » clame-t-elle en repêchant une bouteille, planquée sous quelques serviettes, comme si on pouvait berner la Reine des Alcooliques. Les murmures se taisent, une seconde. Le regard sévère qu'elle lance n'aura pas atténué l'envie oppressante de noyer la réalité. « Et une telle piquette, s'en est presque insultant. » Une gorgée dans le gosier, elle hoquette une vieille vinasse bonne pour leur condition, celle des rats sous le grenier des maisons. « @Houston, @Beijing, j'ose espérer que vous n'influencez pas notre petite @Kyoto ? » Elle observe les donzelles et arque un sourcil. « Si elle est trop ivre pour marcher, c'est vous qui la porterez. » Rires aux bords des lèvres, Varsovie lâche tout son poids pour s'affaler par terre. Epaule contre celle d'@Alexandrie, l'ocytocine fait son chemin, l'air de rien, dans les venelles de ses reins. Glissant le long de l'arête de la mâchoire, elle colle front contre tempe et chuchote son venin, comme félin exprimerait son affection. « Si quelques cadavres finissent par tapisser le sol, je t'en garderai un, ma beauté. » Roucoulements aux aurores, ça picote en sémaphore.

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intrigue deux

▬ pangée, regarde-moi ▬

LES TERRES GRISES | Le crépitement du feu de bois se mêle au bruit de la nature et des palabres des laissés-pour-compte ; ceux qu'on a refusés de protéger à cause de leur clan d'appartenance et ceux qui ont tout simplement refusé cette protection venant des Monarques. Surprise générale quand Kyoto a clamée faire partie de ce dernier groupe. La douce et frêle jeune femme effrayée par tous les vices du monde avait renié le rassurant amphithéâtre pour venir trouver asile dans les Terres Grises. Folie, imbécillité, inconscience, nombreux y étaient allés de leur commentaire. Sourde oreille, celle qui a peur des jugements avait cependant gardé sa ligne de conduite : le ton hautain des Monarques ne lui plaisait guère, elle préférait être ici. Quitte à se faire dévorer ou massacrer par ce fameux "danger" prédit par Olympie, elle préfère l'être en bonne compagnie. Et puis avec son don elle se pensait plus utile ici, si l'un d'eux commençait à paniquer, elle pourrait toujours essayer de l'apaiser comme elle le faisait d'ordinaire avec les créatures du centre de récupération. De plus, même si l'espoir disparaissait au fil des semaines, elle croyait bêtement qu'elle finirait par retrouver son frère par ici. La gamine se voilait la face. Aucune piste depuis son arrivée, l'homme était sûrement mort dans les laboratoires de Pangonium avant même d'avoir posé le pied en Pangée. Elle effaçait ces horribles pensées en papotant avec les autres et en grignotant quelques en-cas devant le feu de camp de fortune.

Tout le monde essayait de garder le sourire, de rire, mais l'angoisse générale était toujours là, tapie dans l'ombre, comme une tumeur agressive prête à déverser son venin. @Varsovie épie la Porte au loin, toujours statique mais prête à dégueuler les pires horreurs. La Reine aux cheveux de feu taquine la douce Kyoto sur sa solidité face à l'alcool. La blonde esquisse un petit sourire, silencieuse, tandis que la femme prend place aux côtés de @Alexandrie. Le regard de la mère endeuillée et de l'enfant orpheline se croise, Kyoto lui fait signe de la tête, comme pour lui signifier que tout va bien. Ses yeux bifurquent alors vers une de ces fameuses bouteilles d'alcool, le stress de la soirée lui donne des idées en désaccord avec sa ligne de conduite. Elle qui est d'ordinaire raisonnable, le stress ambiant lui donne envie de s'enivrer pour oublier. « J'ai une bien meilleure résistance à l'alcool que vous croyez, d'abord ! » La jeune femme aux airs de poupons lance un sourire narquois à l'assemblée, avant de se tourner vers @Houston et @Beijing assises à ses côtés. « Je peux avoir un verre, s'il vous plaît ? » Qui sait ce qui les attend cette nuit, alors autant profiter d'une bonne biture dont elle n'aura peut-être pas les désagréments le lendemain.

intrigue deux

▬ pangée, regarde-moi ▬

La Nuit psalmodie mythologie, solfie sa trame éphemère et dans son parapluie noir, ensable les embryons séculaires. Refrain blanc et noir sous un camposanto d'étoiles, infini lapis-lazuli où l'ombre tiède et nue crève les inerties sur l'adiposité des concupiscents onyx. Avant le tranchant de l'aube, les dernières ivresses, le culmen des cocagnes, la rage en cage.

Depuis le crépuscule, dans le giron des jacasses labadens, Alexandrie s'étire, baille veines alcooliques. Quel fatum, quelle fortune? Sous un dôme sans latitude, sur un sindon d'Angiospermes, la calligraphie des lacunes se sténographie et creuse questions. Boucles charbons et bédouins chitons, elle déguste le cloaque des utopies charpentées dans les ardeurs de minuit.

« Kyoto, si tu trébuches on ne te ramasse pas »

Une petite horde sismique baguenaude autour d'un foyer de scout. L'Oiseau d'Or, la juvénile @Kyoto s'enhardit de pictonner à l'égal de Dionysos. Fort heureusement, @Reykjavik veille le nain avec prudence.

Pourquoi ici plutôt qu'ailleurs? Règne de l'entropie, chimère d'indépendance. Pourquoi le froid bucolique plutôt que les fastes bahuts? Réponse fauche solitude, couche chaleur Belzébuth contre l'écume bleue et déchaume du narcotique ossuaire un frisson titanesque. Son talisman, son tourment. Un traquenard, un cœur en béton à râper d'une âme ulcérée. Contre les flancs de Charybde, Scylla se renfrogne, mille feux dans le plexus.

« Me laisseras-tu dévorer ta couenne si tu péris? »

Pour être mienne à jamais.
Dans ses viscères nulle autre n'en sera le titulaire.
Macabre, émétique, prose charogne gravite sur la pente esseulée d'un parfum de cannelle et d'orange. Ménade jubile tout de suave.

« Mais je te préfère en vie, chaude et chiante, à une momie froide pleine de larves »

Romantique?
Toujours.
L’ambiguïté grogne dans les deux myocardes depuis les eaux noires des premiers pas au Tartare.

Hoquet, débris d'octave, les camarades fourmillent autour, pointent la Porte avec tintouin. La Barbaresque s'empaume d'une grimace. Quelle noirceur derrière l'hayon? Affaiblie par la gangrène et les céphalées, saura t'elle dessiner quelques utilités?

intrigue deux

▬ pangée, regarde-moi ▬

Tu n’avais éprouvé aucun embarras à t’écarter des téméraires agglutinés autour de la porte de la lune, soucieux des nouvelles énigmes qui s’activaient mystérieusement derrière-elle depuis plus d’une semaine. Ton choix aurait pu se porter sur l’amphithéâtre, position sélectionnée par un grand nombre de tes semblables. Mais la protection majoritaire des monarques te rebutait à l’excès et t’obligeait à te confronter aux Terres mortes des exilés. Campée comme tous les autres autour des flammes agitées, tes doigts s’amusaient avec l’une de tes pyramides, tes mains bientôt couvertes d’une légère humidité. Tu te savais entourée de @”Varsovie” et d’@”Alexandrie”, quelques figures populaires auprès desquelles tu exhibais une parfaite neutralité. Tes yeux glissaient parfois sur les autres figures féminines, des faciès dont tu n’avais assurément aucune souvenance. Tu te rappelais peut-être le visage de celle qu’Alexandrie désigna comme @"Kyoto”, petite fille au visage de fée qui avait offert au bal des monarques une danse somptueuse qui t’avait assurément marquée. Les échanges suaves entre Varsovie et Alexandrie laissaient croire à un batifolage pleinement assumé. Tu relevais le menton pour mieux les observer. Des beautés par excellence que tu aurais souhaité compter parmi les belles figures des élégants. Ta pyramide s’évapora quand des verres furent proposés, tu en ramenais un contre tes lippes désormais pleinement comblées. Silencieuse et solitaire, tu écoutais les dires sans broncher le moindre mot.

intrigue deux

▬ pangée, regarde-moi ▬

LES TERRES GRISES | L'atmosphère est tendue, chargée de stress et de mystère. Qu'est-ce que cette grande porte va-t-elle bien pouvoir vomir ? L'esprit imaginatif de la gamine s'égare sur d'effrayantes créatures à l'ADN ultra-modifié par Pangonium, des bêtes à demi-folles et assoiffées de sang. Si de telles choses apparaissent, la douce Kyoto parviendra-t-elle à les calmer comme les autres bêtes sauvages qui passent par le centre de récupération ou se fera-t-elle croquer la main en guise d'amuse-bouche ? Elle attrape le verre qu'on lui sert et noie sa panique dans une gorgée. @Reykjavik semble être contre cette idée, pensée protectrice pour la douce enfant qu'on aurait peur qu'elle se casse au moindre accident. Mais elle sourit, son verre à la main. « Eh bien si cela nous permet de nous amuser un peu et d'oublier cette fichue porte ! » Le regard de la blonde se porte vers la Reine de la soirée, la Porte de la Lune. Tout le monde ce soir en Pangée attend de voir les gonds de la lourde porte grincer et laisser entrevoir leur futur à tous. Mais alors qu'elle se perd dans l'horizon lointain, une blanche lumière se fraye un chemin dans ce qui semble être une ouverture. Elle est à peine visible, mais bien présente. La peur et l'angoisse envahissent son frêle corps. « La-la Porte... il y a une lumière ! Je crois que... » Une main agrippée à son verre tandis que l'autre pointe du doigt la clarté au loin, elle se lève lentement, le visage livide. « Je crois qu'elle s'ouvre ! » Silence de mort dans l'audience, les laissés-pour-compte attendent que sonne le glas.

pangée, regarde-moi

intrigue numéro deux

En pâmoison contre l'ossuaire de sa Cléopâtre, Varsovie échauffe la chair de quelques victuailles couleur sang. ça schlingue dans le caniveau du cerveau, et pourtant, elle se met à rire. « Je ferais une superbe momie ! » qu'elle grogne entre deux rires carnassiers. Pourtant, dans le firmament des odes, naît soudain l'émulsion d'une toute autre mélodie.

Le tourment.

Sautant sur ses deux pattes, le Flamboyante s'extirpe du cercle et chahute avec le vent pour entrevoir l'aveuglante lumière d'un cataclysme encore muet. « Bordel de merde. » Dans le chaos des veines, les synapses envoient milles informations contradictoires. Fuir, se cacher, rester, se faire tuer, affronter, être lâche. Qu'ont-ils dit avant que la nuit ne fâche ? « Je crois que l'heure de la récréation est finie. Si vous avez quelques derniers boniments à dire ou à faire, je crois que c'est le moment. » Les Exilés ont fêté toute la semaine durant comme si venaient leurs derniers jours. Et pourtant, soudain, Varsovie se demande si elle a bien effectué tout ce qu'elle désirait. L'âme toujours accordée à la protection des siens, voilà qu'elle n'a point pensé à ses propres désirs, ni même son propre reflet.

Première réaction du coeur : vouloir prier celui d'@Alexandrie, comme une flûte de pan rameuterait tous les oiseaux en essaim vers le myocarde, piaillant ses rîmes dans une harmonie amoureuse. « Putain. » Plus pour elle-même, cette fois-ci. Et voilà que les paupières se ferment pour tenter de donner du courage. Les muscles se tendent. « Allez, sois une femme. » Les sourcils se froncent. De nouveau, les muscles envoient un électrochoc. Mais elle ne parvient pas à bouger. La peur tend à la tétaniser. « Allez, merde, Marla ! » qu'elle murmure entre ses dents jointes, grinçant leur mécontentement.

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