Beyond the night, a rising sun.

été 2020.
ft. @BOMBAY

Le Soleil déclinait peu-à-peu, laissant à la nuit, son territoire. En accord avec les choses, Anchorage se trouvait sur les Terres Noires. Oh, il avait de bien bonnes raisons, le monarque, de se trouver ici. Et pour une fois que ces raisons était autre que celles du plaisir… Enfin. La conscience un peu en vrac, l’esprit pas vraiment-là. Un enchaînement de plusieurs choses. Tout avait plus ou moins commencé quelques mois plus tôt, en ce début d’année. Enfin, non, tout avait commencé en décembre de l’an dernier, quand un nouveau volontaire, Cancùn, était arrivé. Oh, s’il avait su, il se serait méfié de l’homme. Une vipère, il n’y avait point d’autre mot pour le décrire. Une vipère qui l’avait fait chanter, et qui avait entraîné Anchorage dans une situation qui ne lui plaisait guère. Une situation qui le mettait bien en rage. Entre le fait qu’on ait joué de lui, qu’on ait pu apprendre des petites indiscrétion à son égard, qu’il ait dû trahir une ami, et surtout, que depuis plus de quatre mois il n’ait pas réussi à reprendre le dessus de la situation. Bref, il ne fallait pas parler de Cancùn à Anchorage.

Mais, dans la manigance du nouveau directeur des ventes, Anchorage avait dû entraîner Bombay, sans le vouloir. Et il avait, depuis ce jour-là, un poids sur le coeur qui était assez difficile à porter. Si, jusqu’alors, il avait tout fait pour éviter l’Elégante, pour oublier, penser qu’avec le temps, tout allait s’effacer, voilà qu’aujourd’hui, il se retrouvait sur le Territoire Noir dans l’espoir de mettre cela au clair avec Bombay. Peut-être que le récent discours d’Olympie n’y était pas pour rien ? L’idée de ne pas savoir de quoi allait être demain, et qu’il fallait mieux exposer ses maux avant qu’il ne soit trop tard. Anchorage poussa un soupir après avoir pensé cela. Et c’est ainsi qu’il se retrouva devant l’Abreuvoir.

A défaut d’avoir ouvert la porte, Anchorage l’avait traversée, mais cela revenait au même : elle avait été franchie, le retour en arrière n’était plus vraiment une chose pensable. Il resta un très court instant planté devant, balayant l’ensemble de la pièce dans laquelle il se trouvait. Pas grand monde, à vrai dire, chose normale, on n’allait pas à l’Abreuvoir pour rester à l’accueil… Ajustant machinalement son costume - parce que la classe, il faut l’avoir en toute circonstance - Anchorage se dirigea ensuite vers ce qui servait de réception. « Bonsoir, savez-vous où je peux trouver Bombay ? ». La maquerelle des lieux, Anchorage se doutait qu’il allait la trouver dans le coin, préférant tout de même s’en assurer. On lui indiqua une pièce, non loin de là. Evidemment, le bureau de madame. Anchorage remercia la personne qui tenait l’accueil, et marcha en direction de la zone indiquée. Dans sa tête, tournait en boucle le discours qu’il allait faire. C’était très clair, très net, ça n’allait pas durer. C’était histoire de mettre tout le monde au courant, puis on n’en parle plus. Relativement clair et précis, n’est-ce-pas ? Délicatement, le bout de ses phalanges viennent frapper la porte. A nouveau, le retour arrière était impossible. Légère inspiration, il s’annonça, restant cependant toujours derrière la porte. « Bombay, c’est moi. Anchorage. ». Laissant un instant de vide, il reprit, sur un ton qui ne paraissait pas des plus confiants. « Emily, on a besoin… ». Il s’arrête un instant, grimace sur les lèvres, le on n’est pas approprié, clairement pas. Ca fait mal à l’égo, mais quand il faut le mettre de côté… « J’ai besoin de te parler. Ouvre-moi, s’il-te-plait. ». En insistant bien sur le j’ai - qui pique bien fort à l’égo, parce que c’est mieux quand on est pas le seul à avoir fait n’importe quoi, mais pour le coup, si, Anchorage est bien le seul. Bon, et le petit ouvre-moi, c’était surtout pour la forme. En soit, quoi qu’il arrive, Anchorage est capable de rentrer seul, mais (très étrangement, pas bête l'animal), il s’est dit que dans une situation telle que celle-ci, il valait bien mieux demander la permission, plutôt que de se l’octroyer.
En tout cas, à noter que le petit discours que Anchorage c’était mentalement préparé, eh ben, dès la deuxième phrase, il était tombé à l’eau. Gé-ni-al, il allait improviser à fond, sans savoir ce que ça allait donner.

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Le nez dans son registre, elle vérifiait que tout était en ordre pour ce soir. Pas mal de clients avaient pris l’habitude de réserver des filles pour une soirée, ou même pour une nuit. Elle s’occupait - entre autres - d’organiser les rendez-vous et de faire en sorte qu’il y avait toujours assez de pétales pour tous les autres, ceux qui ne calculaient pas leur venue ou qui se laissaient porter par leurs pulsions. Elle avait tout de même du mal à se concentrer, posant son front dans la paume de sa main en signe de fatigue, cette semaine n’était pas comme les autres. Depuis l’annonce d’Olympie, il y a quelques jours, elle avait eu du mal à trouver le sommeil. Il régnait une drôle d’atmosphère en Pangée, un mélange malsain entre excitation et terreur. Tout le monde attendait et craignait en même temps l’ouverture d’une des portes mystérieuses qui bordaient le territoire. Et cette histoire de trésor ? Bombay ne s’était jamais vraiment posée de question sur Pangonium ou les secrets que la Pangée pouvait cacher. Ça faisait bientôt dix ans qu’elle avait passé les portes du laboratoire, dix ans qu’ils vivaient tous en paix et loin du Fléau, et ça lui suffisait.

On frappa à la porte. « Oui ? » Elle leva la tête. Son regard se porta sur l’horloge accrochée sur le mur en face d’elle. Elle s’était perdue dans ses propres pensées, elle avait encore laissé le temps filer. Et puis sa voix résonna de l’autre côté de la porte. Anchorage. Elle ne répondit pas. Les événements des derniers jours lui avait fait oublier toute cette histoire de trahison. Emily ?! Elle souffla par le nez tout en faisant non de la tête. L’appeler par son prénom, essayer de la prendre par les sentiments, c’était salaud.

Il était venu pour discuter. D’accord.

Il l’avait demandé gentiment. Ok.

Il avait pris la peine de ne pas utiliser sa faculté à passer les murs. Un point en sa faveur.

Mais il ne fallait pas rêver, c’était loin d’être assez. Bombay resta silencieuse encore plusieurs minutes, le laissant poireauter de l’autre côté. Elle repensa à tout ce qu’il s’était passé, comment ils avaient pu en arriver là, qu’est-ce qu’elle avait bien pu lui faire pour qu’il agisse ainsi, contre elle. Emily ne comprenait pas, elle n’avait pas envie de comprendre, elle avait été blessée, elle lui en voulait. Toujours assise à son bureau, la maquerelle posa sa bouche contre ses mains entrelacées l’une dans l’autre ; elle examinait les choix qui s’offraient à elle. Il était trop tard pour faire comme si elle n’était pas là, puisqu’elle avait répondu par la positive lorsqu’elle avait entendu frapper. L’ignorer était une solution, mais elle n’était pas sûre qu’il ne ferait pas le piquer sur le seuil, ou pire qu’il entre sans sa permission. Lui demander de dégager ? Il reviendrait à la charge, jusqu’à ce qu’elle accepte de lui parler. Bombay soupira, elle allait devoir le confronter. Elle se leva et se dirigea vers la porte, qu’elle entrouvrit d’abord, ne laissant passer que sa tête et un regard sévère pour le traître. « Anchorage. » dit-elle pour seule salutation, les mâchoires serrées. Pas de Tobias, pas d’Ancho, pas le moindre signe d’affection, elle souhaitait marquer le fossé qui s’était créé entre eux. Finalement, elle ouvrit la porte en grand, l’invita à entrer d’un signe de la main, puis referma derrière lui. « C’est pas vraiment le bon moment pour parler là. » Elle était calme, elle était douce, mais on pouvait sentir une certaine tension dans sa voix. Elle alla se rasseoir à son bureau pour montrer qu’elle avait du travail, se calant au fond de son siège, on aurait plutôt dit qu’elle boudait. « Et puis je vois pas bien ce qu’on aurait à se dire. » Elle n’arrivait pas à soutenir son regard, elle balayait la pièce entre lui et tout ce qui se trouvait autour. Il y avait un fauteuil en face du bureau. « Tu peux t’asseoir, tu sais ? » Et puis, elle ne dit plus rien. Elle attendait. Il était venu pour parler ? Qu’il le fasse, elle n’était pas obligée de faire la conversation.

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Les minutes paraissent durer des heures. Anchorage sait que Bombay se trouve là derrière cette porte. Bien qu’elle ne pipe pourtant plus aucun mot. L’espace de ces quelques minutes, il se demanda ce qu’il devait faire. Entrer sans y être invité ? C’était la brusquer encore plus, il ne l’avait déjà fait plus tôt, ce n’était pas maintenant qu’il allait le faire. Laisser une lettre d’excuse ? Puisque visiblement elle ne daignait pas vouloir ouvrir, cela risquait d’être la seule solution. Bien que Anchorage avait peur d’être trop peu précis à l’écrit… Par chance son dilemme infernal pris fin quand il perçut du bruit devant de l’intérieur. La porte qui s'entrouvre. « Bonsoir… ». Une brève salutation, soufflée, tout juste perceptible. Qui faisait écho à la salutation bien peu chaleureuse de l’élégante. Oh, bien évidemment, Anchorage comprenait pourquoi elle agissait ainsi - à dire vrai, à sa place, il aurait fait de même. Elle l’invita finalement à entrer. Bon signe. C’était au moins ça. « Si ce n’est pas le bon moment pour toi, je m’en excuse. Habituellement, je t’aurai bien proposé de repasser à une date qui te conviendrai mieux. ». Anchorage tâchait au maximum de garder un air le plus neutre possible. Loin d’être évident, la seule chose qu’il avait envie de faire c’était de se défiler, se tailler, et trouver le moyen de revenir en arrière. Bien en arrière. Avant que tout ceci commence. Malheureusement, parmi tous les volontaires, aucun n’était capable de remonter le temps… Il prit une inspiration, avant de reprendre. « Mais détrompe-toi, je pense que nous avons beaucoup à nous dire… ».

Une force invisible faisait que Anchorage ne pouvait regarder Bombay en face. Même Bombay tout court en fait, il ne parvenait pas à regarder, il fixait un point, loin derrière elle, fuyant à tout prix son regard. C’est pourquoi il fut quand même assez content quand elle l’invita à s’asseoir. « Oui, merci. ». Un petit remerciement, quand même, avant de prendre place dans le fauteuil qui se trouvait face au bureau. De là, les secondes qui s'écoulent semblent durer des heures, une fois encore. « Je voulais déjà te donner mes excuses en face. Pour tout… Enfin, tu sais pourquoi, je suppose. ». Il ignorait si elle accepterait des excuses. De toutes façon, les excuses, ça ne faisait pas tout. Et en plus Anchorage n’était pas doué pour faire des excuses. « Ça ne sert à rien de te demander si tu ne m’en veux pas, je vois bien que c’est le cas… Je m’excuse vraiment. ». Un bref instant, il chercha le regard de Bombay, juste histoire d’avoir confirmation ; bien qu’en soit, c’est une confirmation dont il n’avait pas vraiment besoin tant elle était aussi évidente que les éléphants ont quatre pattes… Par contre, Anchorage se rendit compte qu’il allait devoir vraiment réfléchir avant de parler, parce que si ça continuait, il allait ponctuer ses phrases avec des “je m’excuse, pardon, blabla” et ça n’allait plus vraiment avoir l’air sincère… En plus de faire très enfantin. « Mais, il faut aussi que tu saches que je n’ai pas vraiment eut le choix. ». Il avait dit ses derniers mots d’un air un peu plus timide, et moins confiant - déjà qu’il ne l’était pas vraiment - qu'auparavant. Il avait tellement l’impression de passer pour le gosse qui allait rejeter la faute sur quelqu’un d’autre ! Bon, d’un côté, il gardait toujours en tête que ce n’était pas vraiment de sa faute si la situation actuelle était ainsi. Cancun était le grand responsable. D’ailleurs, rien de penser à cet homme, cela mettait Anchorage hors de lui. Enfin, le soucis maintenant, c’était qu’il cherchait les mots à dire. Comment poursuivre ? Balancer un “c’est Cancun qui a tout manigancé, maintenant que tu sais tout, on fait la paix, et tout redevient comme avant ?” c’était beaucoup trop facile et surtout fallait-il encore qu’elle accepte et comprenne la chose. Long soupir, vraiment très embarrassante et peu commode ce genre d’entourloupe… Généralement, c’était lui, Anchorage qui créait ce type de situation, mais jamais il n’en avait été la victime. Il se disait que peut-être, il allait être un poil plus compatissant envers ceux qu’il enfourne dans de pareils stratagèmes.

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Bombay détestait les conflits. Elle ne se sentait pas très à l’aise, assise là, face à Anchorage. Elle avait décidé d’écouter ce qu’il avait à dire, de le laisser parler, puis de l’inviter à s’en aller et de continuer à le détester. Le plan parfait. A dire vrai, elle ne savait pas bien comment elle pourrait lui pardonner. Ça voulait dire être d’accord avec ce qu’il avait fait. Et clairement, elle n’acceptait pas la trahison. Non, la pilule ne passait pas. D’ailleurs, elle se trouvait bien gentille d’accepter de le recevoir dans son bureau. Il prit tout de même la peine de lui dire qu’en temps normal, il lui aurait demandé de repasser. Oh, tant de politesse… Elle fit non de la tête. Maintenant qu’il était là, il n’allait pas repartir pour revenir un autre jour, c’était débile. Plus vite il aurait fini de s’expliquer, plus vite elle aurait la paix. Elle n’attendait pas forcément une réponse à sa phrase, pourtant selon lui, ils avaient beaucoup de choses à se dire. Elle leva un sourcil, mimique qui ne lui était pas destiné, plutôt pas d’accord. Selon elle, il aurait beaucoup à dire s’il avait l’intention de la convaincre de lui pardonner, mais ça s’arrêtait là.

L’un en face de l’autre, ils s’évitaient du regard. Bombay n’était visiblement pas la seule mal à l’aise. Un silence alourdit la pièce avant qu’Anchorage finisse par ouvrir la bouche pour lui présenter ses excuses. Elle resta silencieuse, son but était toujours de le laisser parler pour se débarrasser de lui le plus vite possible. Il réitère ses excuses. Evidemment qu’elle lui en voulait, elle ne prit même pas la peine de répondre tellement c’était évident mais elle se força à le regarder dans les yeux alors que la seule chose qu’elle voulait c’était fuir. Malgré elle, son ton se fit plus doux. « Ecoute, je ne suis pas sûre que tes excuses suffisent, c’est pas si simple… » Au fond d’elle, ce n’était pas Anchorage qu’elle essayait d’éviter. Juste la situation. La confrontation. Son regard se perdit dans le vide quand elle se rendit compte que sa colère s’était soudainement transformée en tristesse. Elle repensa à tous les bons moments qu’ils avaient passé ensemble, ses souvenirs remontèrent même à l’époque où elle était encore mariée à Kourou. Elle les avait perdus tous les deux. Plus rien ne serait plus jamais pareil. Ça lui foutait une angoisse… Mais pas longtemps car le monarque revint à la charge. A nouveau, son humeur changea ; était-ce de la rancœur que l’on pouvait lire dans ses yeux ? Elle croisa les bras. « Oh arrête Ancho. On a toujours le choix dans la vie. » lui répondit-elle d’un ton haché.

D’un point de vue extérieur, elle était calme, comme imperturbable. Mais son moi intérieur lui criait de l’envoyer chier. Elle se leva, trop agitée pour rester assise plus de cinq minutes. « Moi je crois plutôt que toute cette histoire t’arrangeait bien. » D’un pas lent, elle se dirigea vers un petit meuble où verres et boissons étaient alignés. Elle se servit un fond de wiskey et levant son verre pour désigner Anchorage elle ajouta « Tu veux boire un truc avant de me raconter ce non-choix ? » Elle but cul sec le liquide, grimaçant comme toujours quand il s’agissait d’un alcool fort. En fait, elle ne lui laissa pas le choix, elle remplit deux verres avant d’avoir la réponse d’Ancho. Bombay le connaissait bien, jamais il ne disait non à un verre. Un contenant dans chaque main, elle se rapprocha de lui afin de lui tendre le sien. « Je suis curieuse de savoir comment tu as foutu en l’air une amitié longue de neuf ans. » Elle était dure, mais la rancune qu’elle ressentait depuis des mois était en train de se déverser et n’avait qu’un seul but : noyer Anchorage.

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Le malaise était perceptible, et habitait la pièce et la situation depuis le départ. Anchorage aurait tant voulu qu’elle accepte tout, sans qu’il n’y ait d’explication réelle. Cela aurait été si simple… Dans un monde parallèle, peut-être. Mais ici, non. Il se sentait mal quand Bombay s’exprimait. Il ressentait ses mots avec une telle violence, qu’il lui semblait prendre un coup de poing dans le ventre à chaque fois qu’elle s’exprimait. Non, lui aussi savait que des excuses ne suffisait pas. Mais… Non, on n’avait pas toujours le choix dans la vie. Enfin si, pour le coup, il avait eut le choix. Mais s’il avait pris la deuxième option, c’était lui qui se serait retrouvé dans le pétrin, jusqu’au cou. Sans doute pire encore que ce qu’avait pu connaître Bombay - enfin, il s’en doutait, il ne savait pas exactement qu’elles avaient pu être les répercussions qu’elle avait connue, mais comme elle se trouvait toujours à la même place, il se doutait qu’au final, ce n’était pas si grave que ça. « Non, détrompe-toi. Cette histoire ne m’arrangeait absolument pas… », soit dit en passant, elle ne l’arrange toujours pas d’avantage aujourd’hui. Même, si la réalité des choses étaient un peu plus compliquée. Il aurait tant voulu que rien ne se produise, de revenir au lien qui les unissaient quelques temps en arrière. C’était vraiment une bien meilleure vie. Anchorage soupira, accepta - bien évidemment - le verre de whiskey que lui proposait Bombay. Il avait bien besoin de ça pour affronter la réalité…

Mais elle attendait quand même quelques explications. C’était normal. Il en aurait fait de même. Même s’il ignorait si à la fin, après toutes les explications qu’il allait pouvoir lui donner, quelque chose de positif allait en sortir… « J’ignore comment je vais pouvoir expliquer tout ça… ça risque d’être un peu long, je pense. ». Surtout. Allait-il lui donner une version complète ? Une version plus courte ? A son tour, il but cul sec son verre, un moyen un peu illusoir de se donner du courage - bien qu’on ne se le cache pas, il en aurait fallu un ou deux autres pour parvenir au résultat escompté, mais tant pis, il allait faire avec. « Je n’ai absolument jamais voulu foutre en l’air - pour reprendre ton expression - notre amitié. Ca n’a jamais été mon but. ». C’était vrai. Il reprit son souffle. Comme il n’avait absolument aucune idée de ce qu’il devait dire, il ne savait pas vraiment sur quel pied danser, et plus cela allait, plus la situation le rendait nerveux, il espérait juste que cela n’allait pas se retourner contre lui… « Mais, je te répète, je n’ai pas vraiment eut le choix. Et ne me redis pas qu’on a toujours le choix dans la vie parce que… ». Ok, la il venait de s’enfoncer. Parce qu’il avait quand même eut un peu le choix. Bien qu’en très résumé, son choix c’était que soit, il trahissait la gouverneure des élégants, soit c’était lui qui se retrouvait mal. « Parce que, je ne pouvais pas faire autrement. Tu en aurais fait pareil à ma place, n’importe qui en aurait fait pareil à ma place. »… je suppose ? Cela devait se voir que Anchorage voulait terminer sa phrase en ajoutant ces deux derniers mots, mais il ne les avaient pas sortis. « On s’est joué de moi. Pour tout te dire, j’ai été impliqué de force dans ce plan. On m’a bien laissé voir qu’il n’y avait que deux solutions possible : soit c’était moi qui prenait, soit c’était toi. Tout en sachant que si je faisais le choix de ne pas… Faire ce que je t’ai fais, tu aurais quand même subis. Pas par moi, mais il aurait trouvé un autre moyen de faire pression sur toi. ». C’était vague. Evasif. Des mots sortis ainsi, sans y réfléchir. Mais c’était la pure réalité. En raccourci, sans entrer dans les détails. Mais c’était le cas. « Je n’étais qu’un pion dans cet histoire. Et dans son plan, tu étais aussi un pion, un pion à sacrifier. Et au sommet de cet échiquier, il y celui qui a tout manigancé, et je ne pense pas me tromper en disant que tu sais de qui il s’agit ? ». A ce moment-là, heureusement que Anchorage était assis. Parce que franchement, si cela n’avait pas été le cas, il était fort probable qu’il se soit écroulé. La situation l’inconfortait, le rendant faible et vulnérable. Il tenait son verre vide de ses deux mains, si fort que ses phalanges commençaient à en devenir blanches.

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